Par son Avis n° 18-A-04 du 3 Mai 2018 relatif au secteur agricole, l’Autorité de la Concurrence apporte des clarifications bien utiles quant à l’application des règles de concurrence à ce secteur.
Dans un contexte que l’Autorité décrit, à juste titre selon nous, comme changeant et en constante évolution du fait d’une libéralisation des marchés, de l’Arrêt rendu le 14 novembre 2017 par la Cour de Justice de l’Union Européenne dans l’affaire dite « des endives », mais aussi des modifications apportées au Règlement OCM du 17 décembre 2013 par le Règlement dit « Omnibus » du 13 décembre 2017, ce ne sont pas moins de dix-huit questions que, au sortir des Etats Généraux de l’Alimentation, le Ministre de l’Economie a posées à l’Autorité, s’orientant autour de quatre grands axes :
- Les possibilités de pratiques horizontales entre producteurs au sein des organisations de producteurs (OP) et des associations d’organisations de producteurs (AOP) ;
- Les possibilités d’action des organisations interprofessionnelles (OI) ;
- Les modalités d’application du droit de la concurrence aux démarches dite « tripartites » associant producteurs, industriels et distributeurs ;
- Et enfin, les modalités d’application du droit de la concurrence aux pratiques et accords relatifs aux démarches de qualité.
L’Avis rappelle d’abord que le secteur agricole a toujours occupé une place à part dans les Traités fondant l’Union Européenne, puisque dès 1957, l’article 39 du Traité assignait à la P.A.C des objectifs qui pouvaient entrer en conflit avec les règles de concurrence.
Le même Traité précise toujours que le droit de la concurrence n’est applicable au secteur agricole que dans la mesure déterminée par le législateur de l’Union, en tenant compte des objectifs de la P.A.C, ce qui conduit à admettre une primauté de la P.A.C sur les règles de concurrence.
Force était pourtant de constater que cette primauté était essentiellement théorique, si l’on en juge par la pratique décisionnelle de l’Autorité de la Concurrence elle-même, dont, notamment, la Décision « endives » du 6 mars 2012 amenait sérieusement le lecteur à se demander s’il existait bien une spécificité du secteur agricole au regard des règles de droit de la concurrence.
Ne boudons pas notre plaisir, voilà la même Autorité qui présente l’Arrêt « endives » de la CJUE et le Règlement « Omnibus » précités comme précisant les possibilités offertes aux OP et AOP, ce qui « contribue à la sécurisation du secteur et à la concentration de l’offre ».
Elle observe toutefois que le-dit règlement ne prévoit aucune dérogation à la réglementation des abus de position dominantes, qui peut donc toujours s’appliquer à une OP ou une AOP en fonction des circonstances.
L’Avis précise également que dans leur mission de structuration de filières, les OI, qui ne doivent pas être confondues avec les OP et AOP, peuvent diffuser des indicateurs ou des indices ainsi que des clauses type de répartition de valeur telles que prévues dans le règlement « Omnibus », sous certaines conditions.
La question de la diffusion d’informations n’est pas spécifique aux OI, et la jurisprudence a défini depuis fort longtemps la nature des informations pouvant être diffusées sans heurter le droit de la concurrence.
Les démarches dites « tripartites » associant producteurs, industriels et distributeurs posent un problème particulier, puisque intrinsèquement, il peut s’agir de pratiques prohibées.
Mais les règles de concurrence nationales comme communautaires peuvent permettre de valider par une exemption individuelle un accord qui ne porte qu’une atteinte proportionnée au droit de la concurrence, et qui ne confisque pas au profit de ses seuls auteurs le profit qui en résulte.
Selon l’Avis, de tels accords sont porteurs de gains d’efficience pour les parties, s’ils sont exemptés.
Enfin, l’Avis rappelle que les dérogations prévues par la règlementation agricole permettent de sécuriser la montée en gamme des produits.
Cet Avis devrait donner lieu à l’élaboration de Lignes Directrices par la DGCCRF.
L’Autorité prend soin de préciser qu’elle présente ses analyses « sans préjudice des appréciations qu’elle pourrait être conduite à porter dans le cadre d’une saisine contentieuse ».
Verra-t-on l’Autorité prendre, au contentieux, le contre-pied de son Avis, voire des Lignes Directrices qui en seraient issues ?
Dans un contexte que l’Autorité décrit, à juste titre selon nous, comme changeant et en constante évolution du fait d’une libéralisation des marchés, de l’Arrêt rendu le 14 novembre 2017 par la Cour de Justice de l’Union Européenne dans l’affaire dite « des endives », mais aussi des modifications apportées au Règlement OCM du 17 décembre 2013 par le Règlement dit « Omnibus » du 13 décembre 2017, ce ne sont pas moins de dix-huit questions que, au sortir des Etats Généraux de l’Alimentation, le Ministre de l’Economie a posées à l’Autorité, s’orientant autour de quatre grands axes :
- Les possibilités de pratiques horizontales entre producteurs au sein des organisations de producteurs (OP) et des associations d’organisations de producteurs (AOP) ;
- Les possibilités d’action des organisations interprofessionnelles (OI) ;
- Les modalités d’application du droit de la concurrence aux démarches dite « tripartites » associant producteurs, industriels et distributeurs ;
- Et enfin, les modalités d’application du droit de la concurrence aux pratiques et accords relatifs aux démarches de qualité.
L’Avis rappelle d’abord que le secteur agricole a toujours occupé une place à part dans les Traités fondant l’Union Européenne, puisque dès 1957, l’article 39 du Traité assignait à la P.A.C des objectifs qui pouvaient entrer en conflit avec les règles de concurrence.
Le même Traité précise toujours que le droit de la concurrence n’est applicable au secteur agricole que dans la mesure déterminée par le législateur de l’Union, en tenant compte des objectifs de la P.A.C, ce qui conduit à admettre une primauté de la P.A.C sur les règles de concurrence.
Force était pourtant de constater que cette primauté était essentiellement théorique, si l’on en juge par la pratique décisionnelle de l’Autorité de la Concurrence elle-même, dont, notamment, la Décision « endives » du 6 mars 2012 amenait sérieusement le lecteur à se demander s’il existait bien une spécificité du secteur agricole au regard des règles de droit de la concurrence.
Ne boudons pas notre plaisir, voilà la même Autorité qui présente l’Arrêt « endives » de la CJUE et le Règlement « Omnibus » précités comme précisant les possibilités offertes aux OP et AOP, ce qui « contribue à la sécurisation du secteur et à la concentration de l’offre ».
Elle observe toutefois que le-dit règlement ne prévoit aucune dérogation à la réglementation des abus de position dominantes, qui peut donc toujours s’appliquer à une OP ou une AOP en fonction des circonstances.
L’Avis précise également que dans leur mission de structuration de filières, les OI, qui ne doivent pas être confondues avec les OP et AOP, peuvent diffuser des indicateurs ou des indices ainsi que des clauses type de répartition de valeur telles que prévues dans le règlement « Omnibus », sous certaines conditions.
La question de la diffusion d’informations n’est pas spécifique aux OI, et la jurisprudence a défini depuis fort longtemps la nature des informations pouvant être diffusées sans heurter le droit de la concurrence.
Les démarches dites « tripartites » associant producteurs, industriels et distributeurs posent un problème particulier, puisque intrinsèquement, il peut s’agir de pratiques prohibées.
Mais les règles de concurrence nationales comme communautaires peuvent permettre de valider par une exemption individuelle un accord qui ne porte qu’une atteinte proportionnée au droit de la concurrence, et qui ne confisque pas au profit de ses seuls auteurs le profit qui en résulte.
Selon l’Avis, de tels accords sont porteurs de gains d’efficience pour les parties, s’ils sont exemptés.
Enfin, l’Avis rappelle que les dérogations prévues par la règlementation agricole permettent de sécuriser la montée en gamme des produits.
Cet Avis devrait donner lieu à l’élaboration de Lignes Directrices par la DGCCRF.
L’Autorité prend soin de préciser qu’elle présente ses analyses « sans préjudice des appréciations qu’elle pourrait être conduite à porter dans le cadre d’une saisine contentieuse ».
Verra-t-on l’Autorité prendre, au contentieux, le contre-pied de son Avis, voire des Lignes Directrices qui en seraient issues ?